L’entrepreneur burundais se heurte à des contraintes d’ordre juridique qui l’empêchent de s’épanouir dans sa voie entrepreneurial, selon le docteur en droit, Emery Nukuri, qui s’exprimait lundi le 16 décembre 2019, à Bujumbura, au cours de sa présentation d’une analyse menée sur « Les contraintes juridiques qui régissent les agences de régulation comme le BBN et CNTA et d’autres qui bloquent la libre entreprise au Burundi».
Cette étude a été commanditée par Centre for developement and enterprises (CDE-Great Lakes) dans le cadre de sa campagne « Birashoboka » qui vise à réduire la pauvreté au Burundi. Ce professeur d’université a fait remarquer que des avancées significatives ont été enregistrées du côté de l’Agence pour la promotion des investisseurs (API) au niveau de la création des entreprises, ce qui, selon lui, constitue un encouragement aux investisseurs.
Néanmoins, malgré ces pas déjà franchis, tout n’est rose, d’après Dr Nukuri, qui évoque entre autres l’absence des moyens pour suivre si les sociétés créées fonctionnent normalement, si certaines sociétés créées n’existent qu’aux yeux de la loi car elles n’ont pas de siège social ni ne fonctionnent pas réellement, et l’absence d’une centrale de bilans qui ne lui permet pas d’évaluer les performances économiques des entreprises crées.
Cependant, au stade suivant, la société qui veut commercialiser ses produits éprouve des difficultés pour obtenir un certificat de conformité de son produit, qui est octroyé par le BBN, conformément à la loi.
Selon Dr Nukuri, les inspecteurs du BBN se rendent sur terrain pour faire l’inspection dans les trois jours après lesquels ils lui donnent une facture des frais nécessaires pour analyser ce produit, a-t-il expliqué. Lorsque l’entrepreneur a déjà payé dans les 10 jours, le BBN
devrait normalement lui donner les résultats des analyses sur base desquelles il doit délivrer le certificat de conformité, a-t-il estimé.
Pratiquement, a-t-il déploré, le BBN prend plus de temps pour certifier les produits, ce qui occasionne des pertes pour des entrepreneurs. La raison est que le BBN, qui n’a pas son propre laboratoire équipé à 100% pour faire lui-même des analyses, fait recours à d’autres laboratoires extérieurs.
A cette contrainte majeure s’ajoutent l’insuffisance des véhicules pour le transport des échantillons et le personnel qualifié du BBN qui est, souvent tenté, d’aller travailler dans d’autres laboratoires qui payent mieux que le BBN.
A ce niveau, ce professeur d’université encourage le gouvernement à prendre des initiatives allant dans le sens de l’amélioration des conditions de travail, de la recherche des moyens financiers avec l’appui des partenaires pour équiper les laboratoires afin que la certification soit faite dans les délais. Ces initiatives pourraient, en quelque sorte, encourager les entrepreneurs à faire certifier leurs produits et empêcher la fuite des capitaux et des cerveaux vers l’étranger.
D’après cette étude, il est remarquable que suite à ces contraintes liées à la certification, peu d’entreprises sont créées dans le secteur agricole. En effet, selon les statistiques officielles, 2289 entreprises ont été créés à l’API en 2018, soit une évolution de 5,4% par rapport à l’année 2016.
En matière d’emplois, les 2289 entreprises créées comptent augmenter 10,6% par rapport à l’année passée. Cependant, constate-t-on, seuls 4% des entreprises crées œuvrent dans le secteur de l’agriculture et l’élevage. En 2019, l’API a enregistré 3430 entreprises, ce qui constitue une augmentation des entreprises créées de 54% par rapport à l’année 2018.
En tout état de cause, il est fort remarquable que le secteur de l’agriculture et de l’élevage qui, normalement fait vivre plus de 90% de la population burundaise, n’attire pas beaucoup d’entrepreneurs car seules 4% sont créés en ce domaine, a souligné Dr Nukuri, indiquant que le chemin à est encore long pour des produits agro-alimentaires transformés et certifiés.