BUJUMBURA, 29 mars (ABP) – Le directeur général ai de l’autonomisation de la femme et de la promotion de la fille au ministère de la Solidarité nationale, des Affaires sociales, des Droits de la personne humaine et du Genre, Mme Claudine Ahishakiye et la présidente de l’association Dushirehamwe, Mme Pascasie Sinzinkayo ont confirmé, lors d’une interview avec l’ABP, que les femmes rurales sont des piliers du développement économique des familles et du pays.
Mme Ahishakiye a d’abord rappelé que d’une manière générale, au Burundi, les femmes rurales sont majoritaires par rapport au reste de la population en général et aux femmes instruites en particulier.
Selon le recensement général de la population de 2008 (RGP) fait par l’ISTEEBU, l’économie du Burundi est essentiellement agricole. Le secteur primaire (agriculture, élevage) occupe 90% de la population active dont 55,2% constitue la population féminine.
Une étude de la FAO (en 2002) indique aussi que 97,4% des femmes rurales exercent dans le secteur agricole, l’activité dominante de l’économie burundaise qui rapporte une valeur ajoutée de plus de 50% du PIB, et 95% de l’offre alimentaire.
Mme Ahishakiye a ajouté que « les femmes rurales du Burundi constituent le pilier des familles et le moteur de l’économie ». Elle a expliqué que les femmes marquent une forte présence dans la main d’œuvre agricole dans les activités comme le labour, le semis, le sarclage, la récolte, le transport, la conservation, la transformation et la commercialisation des produits agricoles. Elles doivent en plus assumer tous les travaux ménagers dont l’approvisionnement en eau à la famille, trouver des combustibles, faire la cuisine, la propreté des ménages en plus de la charge des enfants et du bétail, améliorer la sécurité alimentaire et lutter contre la pauvreté. « Sans elles la vie et le développement des ménages n’est pas possible », a insisté Mme Ahishakiye.
Elle n’a pas manqué de signaler que le ministère en charge du genre est en train de déployer beaucoup d’efforts pour autonomiser les femmes rurales. Elle a aussi salué le pas déjà franchi par les femmes rurales en comprenant l’avantage de travailler ensemble en se regroupant dans des coopératives pour accéder au crédit afin d’exécuter des projets de développement pour arriver à leur autonomisation socioéconomique.
Pour la présidente et représentante légale de l’association « Dushirehamwe » intervenant dans le domaine de l’autonomisation de la femme, elle a aussi soutenu que » l’apport de la femme rurale dans le développement de la société burundaise reste le pilier irréversible dans l’économie nationale”. Elle a expliqué que les femmes regroupées en association de tontines ou de CILC et autres ont démontré une force extraordinaire. Elles ont été à la base de changements sociaux spectaculaires au sein des ménages souvent avec peu de moyens.
Néanmoins, a-t-elle déploré, elles restent fragiles dans la mesure où elles sont constituées par des membres analphabètes et ne disposant pas toujours de connaissances suffisantes pour travailler de façon professionnelle. En plus certaines femmes manquent encore en elles l’estime de soi. D’autres défis signalés c’est que les femmes rurales dont la majorité travaille dans le domaine agricole n’ont pas été suffisamment sensibilisées et formées sur les techniques agricoles modernes. En outre, le manque de semences sélectionnées et des intrants, et le changement climatique, font que ces dernières enregistrent des pertes au niveau de la production.
Mme Sinzinkayo déplore également le fait que les femmes rurales n’ont pas droit à la terre, expliquant que la terre qui est la base de la production agricole revient à l’homme. La femme n’a ni accès au contrôle des bénéfices en provenance des ressources de production, ni le pouvoir de décider sur leur utilisation.
Sévère Hatungimana et Catherine Ndayishimiye de la colline Nyakanazi, commune Gishubi de la province Gitega, sont membres du groupement de développement « Nawe Nuze » encourageant les gens à épargner ensemble pour permettre ensuite des emprunts mutuels à un taux d’intérêt raisonnable. Chaque membre cotise 600 fbu par semaine. Ainsi, a déclaré Mme Hatungimana : « J’ai contracté un crédit de 50 mille auprès du groupement Nawe Nuze dont je suis membre. J’ai acheté un porcelet et deux lapereaux. Après quelques mois, ils ont commencé à se reproduire. À chaque mis à bas du porc qui peut atteindre même à plus de 9 porcelets, je vends ces derniers et je vends aussi les lapins adultes et quelques lapereaux. L’argent trouvé dans cette vente permet de subvenir aux besoins de ma famille. Le fumier en provenance de cet élevage est utilisé dans la fertilisation de mes cultures. La vie de ma famille a été améliorée grâce au groupement Nawe Nuze. »
La pratique de l’agriculture traditionnelle fait que la production ne soit pas abondante. Elle demande au ministère de l’agriculture d’être tout près des agriculteurs pour montrer les bonnes pratiques agricoles, multiplier les semences sélectionnées et rendre disponible les intrants. La polygamie et les violences faites aux femmes par certains hommes handicapent aussi le développement de la femme, se lamente Mme Sévère Hatungimana.