BUJUMBURA, 20 juin (ABP) – » Nombreuses analyses et recherches stipulent que l’usage des intrants chimiques de synthèse dans l’agriculture met en danger la santé humaine, la qualité de la terre nourricière et de l’eau, et les ressources de la biodiversité », a affirmé le directeur de l’Institut africain pour le développement économique et social au Burundi (Inades-Formation Burundi), M. Joseph Nigeze, lors d’une interview accordée à l’ABP mercredi le 19 juin 2024.
Il a rappelé que les pesticides chimiques (les insecticides, les fongicides, les acaricides, les herbicides et autres) sont des substances chimiques utilisées pour tuer, repousser ou contrôler les organismes considérés comme nuisibles, tels que les insectes, les mauvaises herbes, les champignons et les bactéries. Ces derniers sont aussi appelés des produits phytosanitaires et servent à protéger les cultures agricoles contre différentes menaces afin de limiter les risques de perte des récoltes et d’améliorer le rendement.
Selon le directeur de l’Inades-formation, au Burundi comme ailleurs dans le monde, l’objectif majeur des gouvernements est de nourrir les populations qui augmentent sans cesse. C’est dans ce cadre qu’ils font recours à l’utilisation des produits chimiques pour augmenter la production agricole. Malgré cela, au lieu d’être une solution, l’usage excessif des intrants chimiques de synthèse présente un danger et une menace pour l’humanité. Certaines études ont déjà prouvé que le rythme d’augmentation de la maladie du cancer serait lié aux produits chimiques. Ces derniers contribuent aussi à la dégradation de la nature et de l’environnement. Il a donné l’exemple des sols qui deviennent acide suite à l’utilisation excessive des engrais chimiques. Il n’a pas manqué de signaler que pour le cas du Burundi, beaucoup d’éléments peuvent être trouvés dans une étude conduite par Inades-formation Burundi sur la gestion et l’utilisation des produits chimiques de synthèse. Cette étude a été restituée et validée le 9 août 2022 par les partenaires œuvrant dans le domaine agricole, avec les représentants du ministère de l’Environnement, de l’Agriculture et de l’Elevage. L’objet de l’étude est de susciter la prise de conscience sur la santé humaine et sur l’environnement, d’analyser le cadre légal en matière de gestion des pesticides et les méthodes de protection des cultures, de présenter les résultats des essais des alternatives conduits en collaboration avec l’ISABU et déjà expérimentés sur terrain par les bénéficiaires accompagnés par Inades-formation Burundi.
M. Nigeze a fait savoir que l’Inades-formation Burundi voudrait promouvoir une alimentation saine et durable en proposant une diminution progressive des intrants chimiques et en augmentant l’utilisation des biopesticides et biofertilisants. La recherche effectuée par l’ISABU, en collaboration avec Inades-formation Burundi, montre bien que ces intrants sont efficaces et contribuent à l’augmentation de la production agricole. Toutes ces actions rentrent dans le cadre de la campagne : conscience aliment terre d’Inades-formation Burundi pour attirer l’attention sur le lien intrinsèque entre la terre et la nourriture, entre la qualité de la terre et la qualité de la nourriture qu’elle produit. En prenant soin de la terre, on le fait aussi pour l’eau et les ressources de la biodiversité, qui sont des aspects essentiels pour une vie saine des consommateurs, des agriculteurs et travailleurs agricoles.
Selon M. Nigeze, Inades-formation propose des alternatives tant dans le traitement des maladies et ravageurs dans les champs et celui des ravageurs dans les stocks. Sur base des fiches techniques validées produites après la recherche effectuée par l’ISABU en collaboration avec Inades-formation Burundi, il est proposé l’utilisation des plantes pesticides comme les extraits des feuilles de Neem (Azadirachta indica et Melia azedirach) contre la Chenille légionnaire d’automne sur la culture de maïs. Il y a aussi la poudre de Neem dans la gestion de la Chenille légionnaire d’automne sur le maïs, les extraits de tithonia dans la gestion de ladite Chenille, la latérite, le kaolin, le calcaire et l’huile de palme dans la gestion des buches du haricot en stock. Il y a aussi la terre rouge, le kaolin, le calcaire et l’huile de palme dans la gestion des charançons de maïs en stock. Il y a une fumure bio appelée » Ntabizawimbure » qui peut remplacer les engrais chimiques dans le champ.
S’agissant des défis liés à l’utilisation des pesticides chimiques, le directeur de l’Inades-formation a fait remarquer que les pesticides utilisés par les agriculteurs ne sont pas tous homologués, il y a une prolifération de pesticides non homologués et vendus sans étiquettes. Les vendeurs ou utilisateurs directs des pesticides n’ont pas assez de connaissances sur la toxicité et les principes de manutention des produits chimiques. La diversité des noms des produits sur le marché ainsi que la variabilité des matières actives dans les produits échappent parfois à l’équipe chargée de l’homologation de ces produits. Une grande partie de la population n’est pas encore sensibilisée sur l’utilisation des biopesticides.
Il est à signaler que l’Inades-formation est une association sans but lucratif. Elle travaille pour la promotion des populations rurales, à travers la formation, l’accompagnement et les appuis techniques. Elle travaille sur les programmes de systèmes alimentaires basés sur l’agriculture familiale et l’agroécologie, la microfinance communautaire, la résilience au changement climatique, ainsi que la gouvernance dans les coopératives et les ménages.