BUJUMBURA, 13 juil (ABP) – Le président de la Commission Vérité et Réconciliation (CVR), M. Pierre Claver Ndayicariye, a organisé mercredi, le 12 juillet 2023, en mairie de Bujumbura, une conférence sous le thème : » Les sauveteurs et leurs motivations » , pour informer l’opinion que dans toutes les crises cycliques que le Burundi a traversées, dont celle de 1972, il y a des Burundais ou des étrangers qui ont protégé les autres, sans tenir compte de leur appartenance ethnique, religieuse, régionale et autres.
Dans son allocution, M. Ndayicariye a fait savoir qu’actuellement, à partir des témoignages des rescapés, la CVR a déjà connu plus de 11 mille sauveteurs lors des événements tragiques de 1972.
Parmi ces derniers, il y avait des Burundais de l’ethnie Tutsi qui ont sauvé les Burundais de l’ethnie Hutu, et vice -versa, et les étrangers qui ont sauvé tous les ethnies des Burundais.
A titre d’exemple, le président de la CVR a cité un commerçant du nom de Barakekenwa Joseph, Tutsi de Buhiga dans la province actuelle de Karusi, qui a sauvé beaucoup de Hutu en les empêchant de répondre aux convocations communales, parce que celui ou celle qui répondait à ces dernières trouvait la mort. Il a aussi cité l’Abbé Gahebe Charles qui était le curé de la paroisse Makebuko qui a sauvé beaucoup de Hutus dont Firmat Nahayo, qui était enseignant à l’école primaire.
L’Abbé Gustave Seigneur, qui était directeur a.i à l’ancien collège du Saint Esprit, a sauvé la vie des élèves Hutus qui fréquentaient cette école à cette époque de 1972. Il en est de même pour Pierre Nkanira qui était directeur du petit séminaire de Kanyosha qui a fait tout son possible pour protéger la vie de ses élèves.
M. Ntemako Pascal a sauvé la vie des élèves Hutus du Lycée Scheppers Nyakabiga, et l’Abbé Joachim Ruhuna, qui était recteur du grand séminaire de Bujumbura, a sauvé la vie de beaucoup de Hutus comme en témoigne aussi Fabien Segatwa, qui était étudiant à l’Université du Burundi en 1972, qui, lui aussi, a été sauvé grâce à l’Abbé Joachim Ruhuna, qui a été, par après, Monseigneur de l’archevêque de Gitega.
L’élève Tutsi Mukuri Pierre Claver, qui étudiait à l’ETS Kamenge, a sauvé, lui aussi, la vie de certains élèves Hutus qui fréquentaient cette école.
Dans son témoignage, Révocat Makobero qui enseignait à l’école primaire dans l’arrondissement de Karusi, qui était présent dans cette conférence a fait savoir que sa vie a été sauvée grâce à Nzokirantevye Denis, qui était un Tutsi, avec qui, il cohabitait. « On m’a attrapé au marché de Karusi m’accusant d’être un traitre et on m’a emprisonné. C’est M. Nzokirantevye qui a fourni beaucoup d’efforts pour que je sois libéré, au moment où beaucoup de Hutus ont trouvé la mort dans les prisons. »
Le président de la CVR a fait savoir que malgré que ces sauveteurs aient protégé la vie de certaines personnes, ils ont été menacés par la communauté. Certains ont été emprisonnés, les autres ont été tués, au moment où il y en a ceux qui ont été rejetés par la société, parce que les tueurs considéraient que les sauveteurs devraient se comporter comme eux, ce qui fait que la cohabitation n’a pas été facile.
M. Ndayicariye a insisté sur la valorisation des sauveteurs. Il a précisé que cette thématique de sauveteurs doit être approfondie et que la CVR se prépare pour un recensement au niveau national pour savoir qui a sauvé qui, dans quelles circonstances, et pour quelles motivations.
Il a signalé que ce recensement prévoit aussi d’inclure les personnes assassinées ou disparues en 1972-1973, celles qui se sont lancées déjà dans la démarche du pardon et celles qui se préparent à accorder le pardon.
Comme il y a certains qui ont été sauveteurs sur une colline et tueurs sur l’autre colline, la CVR précise qu’elle cherche des sauveteurs véritables, porteurs de valeurs de l’humanité, des hommes qui sont vus aux yeux de la communauté comme de véritables hommes intègres qui se sont donnés pour les autres.
Le président de la CVR a exprimé ses remerciements envers les sauveteurs de toutes les régions du Burundi, toutes les familles du Burundi, toutes les provinces, de toutes les ethnies expliquant que « l’ethnie ne tue pas, mais que, c’est l’homme qui tue ».