BUJUMBURA, 17 avr (ABP)–L’Association burundaise pour des écrivains et promoteurs du livre (ABEPL) a, dans le cadre de journée internationale du livre, organisé le jeudi 13 avril 2023 à Bujumbura, un panel articulé autour du thème:« La place du livre dans la culture au Burundi » et les panelistes fustigent la place négligeable que la société burundaise accorde au livre et à la lecture.
Le directeur du centre burundais pour la lecture et l’animation culturelle, M. Sébastien Ntahongendera indique que le livre tout comme la langue est le véhicule de la culture. Il estime que cette journée dédiée au livre rentre dans la gamme du ministère ayant la culture dans ses attributions qui est en train de promouvoir la lecture à travers les centres d’animation culturelle (CLAC).
Selon toujours lui, la journée internationale dédiée au livre colle bien avec la nouvelle politique culturelle qui met le livre en général et la lecture en particulier au centre des préoccupations, d’où elle ne peut que rencontrer un accueil favorable dans les milieux socio-cultuels burundais. M. Ntahondereye affirme que les Burundais ne lisent plus et donne, en détails, les raisons qui, selon lui, ont occasionné cette situation : « Les Burundais ne lisent plus comme avant et cela est dû à la situation politico-sécuritaire que le pays a connu de façon cyclique qui a entrainé l’effondrement de l’économie. Cette situation a touché, en même temps, l’école et le livre », a-t-il expliqué. Il indique qu’un certain moment on a assisté à des établissements qui avaient de la peine à se procurer des livres et cette condition a produit une génération qui n’a pas lu non pas parce qu’elle ne le voulait pas mais parce qu’il n’y avait pas de quoi lire. Cependant, M. Ntahondereye garde l’espoir que la situation peut changer: « Aujourd’hui les gens ne lisent pas comme on le souhaite mais je pense que c’est une situation qui peut évoluer », a-t-il persuadé.
C’est ainsi qu’il recommande aux burundais l’amour de la lecture : « Je pense que les Burundais en général devraient renouer avec la lecture car lire c’est voyager dans le temps et dans l’espace. Avec la lecture on est au courant de ce qui s’est passé, ce qui se passe mais aussi et surtout de ce qui se passera à travers les œuvres de fictions », a-t-il signifié.
Aux écrivains Ntahondereye leur recommande d’êtres des écrivains de leur peuple tout en produisant des œuvres qui attirent d’abord les burundais : «Comme on dit que le peuple ne lit pas il faut que les écrivaient parviennent à gagner l’âme du peuple burundais tout en produisant des œuvres qui attirent », recommande-t-il.
La présidente de l’ABEPL et représentante pays de la ligue des écrivains d’Afrique, Mme Jeanne d’Arc Nduwayo indique, quant à elle, que le livre est le pilier du développement, un pont entre les générations mais aussi et surtout une source d’éducation et de connaissance. Cependant, elle déplore qu’au Burundi le livre n’a pas sa juste place. « Nous voulons que le livre ait sa place dans la culture, dans l’éducation et dans le pays », a-t-elle déclaré.
Elle déplore que l’écrivain burundais fait face à de nombreux défis notamment ceux liés au manque de maisons d’édition où même celles qui sont disponibles sont des maisons d’édition à compte d’auteurs qui obligent l’auteur à payer tous les frais liés à la publication : « Imaginez un burundais qui a écrit un livre et qui va dépenser son argent pour sa sortie dans un contexte où il y a moins de consommateurs ! », a-t-elle déploré.
Pour ce faire, Nduwayo recommande au gouvernement de promouvoir l’édition au Burundi afin qu’il y ait des maisons d’édition à compte d’éditeur mais en attendant cela elle propose l’exonération de l’importation des œuvres éditées à l’étranger.
Mme Concilie Bigirimana, professeur de littérature à l’Université du Burundi (UB) considère, elle, que le Burundi étant historiquement et traditionnellement un pays où le savoir se transmettait par voie orale, ceci pourrait être un facteur qui serait à l’origine de ce manque d’intérêt pour la lecture et l’écriture et qui fait que le livre occupe une place dérisoire. Elle estime, dans ce cas, qu’il est difficile de directement sauter sur un livre et de réussir. Elle se questionne, par ailleurs, sur les deux verbes, « lire » « et boire », qui s’apparentent où c’est visiblement le boire qui remporte sur le lire.
Néanmoins, le Burundi n’est pas le seul pays au monde à avoir connu une longue tradition orale d’où il est difficile de confirmer à 100% que cette situation aurait affecté livre. Les raisons profondes de ce désamour envers le livre observé chez les Burundais pourraient se trouver ailleurs.